PAUL COERTEN & QUEEN
Récit de sa première rencontre avec le groupe Queen.
Une de mes plus belles expériences professionnelles réside dans ma rencontre avec le groupe de Freddie Mercury, Queen. C'était la première fois qu'un groupe faisait salle comble deux jours d'affilée à Forest National. Du pur délire ! Jo Goovaerts, label manager devenu directeur de EMI, me contacte et m'apprend que les producteurs du groupe ont décidé de louer la salle pour un troisième jour dans le but de procéder au tournage d'un clip vidéo. Il me demande de couvrir le tournage.
Une fois sur place je réalise l'ampleur des moyens mis à la disposition des membres de Queen. Une luma (caméra arrimée au bout d'un bras articulé) circule sur un travelling sur tout le devant de la scène. Un technicien manipule une sorte de joy stick qui fait évoluer la caméra dans l'espace. Celle-ci monte au-dessus des têtes des musiciens pour les filmer en plongée puis redescend au raz du sol pour cadrer le batteur en contre-plongée. De marque française ce dispositif a définitivement révolutionné la manière de filmer les concerts et surtout le public en le survolant.
Je suis présenté à Freddie Mercury, très cool, qui me dit : « You do what you want ». Je comprends qu'il me laisse le champ libre. Que même si je me retrouve dans le champ de la Luma, c'est pas grave, ce sera coupé au montage. Je déballe mon matériel et je me prépare à l'action. Forest National, sans aucun spectateur, c'est vachement impressionnant. Mais lorsque le groupe se lance dans sa prestation et joue sans interruption durant deux heures uniquement pour la caméra et… pour mon objectif ça n'a pas de nom. C'est grandiose ! Emouvant ! Extraordinaire ! Je garde un souvenir indélébile de la formidable prestation de Freddie Mercury qui était un vrai monstre sacré et un perfectionniste hors pair. J'ai donc réalisé plusieurs bobines de dias couleurs qu'on m'a demandé d'envoyer en Angleterre. Quelques jours plus tard, je reçois un coup de fil de Londres : « Hello Paul, la Company a beaucoup apprécié votre reportage et a décidé de vous l'acheter dans son intégralité. Quel est votre tarif ? »
Comme je n'ai pas la moindre idée de ce que valent deux heures travail de rêve à bosser pour les « Queen ». Je décide de demander conseil auprès de Jo Goovaerts qui me dit : « Combien veux-tu » ? Je lui réponds : quarante mille balles (1000 €). Il téléphone chez son homologue anglais, lui explique la situation. Il raccroche et me dit avec un petite sourire : « Tu veux tripler ou même quadrupler tes exigences ». Je suis à la fois agréablement surpris et un peu ennuyé. Car je ne sais pas trop comment annoncer un montant aussi mirobolant à la Company. Et pourtant tout s'est passé comme une lettre à la poste. J'ai reconverti le tarif de ma prestation à la hausse comme convenu. L'agence de Queen n'a pas sourcillé et m'a juste dit : « Envoyez-nous un fax pour l'accord de la cessation des droits et on vous réglera la facture ».