QUEEN - A DAY AT THE RACES (1976)
A Day at the Races, à défaut de vouloir imiter l’album précédent (et heureusement !), comme bon nombre de personnes le croient, apparaît comme son complémentaire, la deuxième face de la pièce de monnaie, aussi sûrement que le jour et la nuit se complètent dans le petit cycle d’une journée terrestre.
On s’en rendra compte, cet album est excellent, mais paraît plus mature, ou du moins plus mesuré que sa grande sœur. On y retrouve une ambiance chatoyante et luxueuse, mais dont le coup de folie a légèrement diminué (à ce titre, on ne retrouvera pas de morceau fleuve comme le Prophet’s Song ou de titre grandiloquent comme Bohemian Rhapsody . Ce qui pourra paraître paradoxal, à l’image de la pochette, c’est que l’ambiance semble plus sombre. Alors qu’A night at the opera, censément nocturne, affichait une clarté décomplexée, A day at the races se pare de la teinte vespérale d’une tenue de soirée.
Reste que A Day At the Races garde la grande classe et possède des atouts, entre pop et hard rock, qui ont de quoi séduire.
Or donc, on entre dans l’album, passée la courte introduction de rigueur, sur le très rentre-dedans Tie Your Mother Down, grande leçon de hard rock accrocheur et ironique (« Take your little brother swimmin‘ with a brick, that’s allright… »), qui ne pâlit absolument pas, d’ailleurs, face à un Death On Two Legs dans le même genre. Ce serait même plutôt le contraire. Ensuite on enchaîne avec une sérénade aux accents de complainte feutrée, You Take My Breath Away, qui prouve, s’il y en avait encore besoin, que Freddie Mercury peut faire frissonner avec de simples accords de piano pour le soutenir.
Autre joyau sur la couronne, The Millionaire Waltz, qui, comme son nom l’indique, adopte le rythme ample de la valse, mené d’abord au piano, puis ensuite à la guitare et soumit à de subtiles variations, comme tel passage introspectif ou telle explosion de riffs, avec un bonheur certain.
On peut évoquer aussi le célèbre Somebody to Love, dont les chœurs prennent des inflexions gospels, Good Old-Fashioned Lover Boy, délicieusement rétro (tout est dans le titre) où Freddie s’improvise crooner ou encore les agréables pop-rock Long Away (chanté par May) et You and I. Notons pour finir le hard rock White Man et l’introspectif Drowse (interprété par Roger), un peu moins marquants, mais qui s’apprécient malgré tout comme des morceaux charnières. Et l’album s’achève alors sur l’excellente ballade Teo Torriate, qui joue sur la montée en puissance et les chœurs, avec une mélodie et deux refrains (dont le second est en japonais) des plus accrocheurs.
A effectuer un tel inventaire, on se rend compte qu’il n’y a rien à jeter sur cet album : il tient la distance et il ne cherche pas, dans une vaine tentative, à renouveler l’expérience A night at the opera ; apprécions-le à sa juste valeur : un petit bijou trop souvent sous-estimé dans la longue discographie de Queen (car manquant de tubes, sans doute).
En conclusion, A Day at the Races est donc plutôt riche émotionnellement, moins délirant que son prédécesseur, mais peut-être plus homogène, outre le côté romantique davantage observé, et à mon avis, l’auditeur n’y perd pas tant que ça au change. Le groupe va de l’avant, évolue et c’est tant mieux, comme le prouveront encore les albums suivants, à chaque fois différents.
Un indispensable du groupe.