ROGER TAYLOR - HAPPINESS ? (1994)
Roger Taylor, ancien batteur de Queen, a toujours été le membre qui se démarquait le plus au sein de cette formation ô combien connue et respectée désormais. En effet, jusqu’en 1982, il est le seul membre du groupe à chanter toutes les chansons qu’il écrit à la place de Freddie Mercury. Il est le premier à sortir un album solo en 1981 (Fun In Space) et remet le couvert en 1984 avec Strange Frontier. Il fonde en 1988 le groupe The Cross, avec lequel il sortira trois albums qui passent pour ainsi dire inaperçus… Peu importe, Roger Taylor a de l’énergie à revendre, comme on le voit sur ses compositions queeniennes même si les dernières sont plus douces et mélancoliques… Happiness ? se distingue par cette alliance entre titres nerveux et compositions plus posées. L’intérêt de cet album réside également dans son caractère très personnel, Roger Taylor étant à la fois producteur, compositeur, interprète et musicien.
L’ensemble est très propre, plutôt homogène et assez éloigné de l’univers de Queen. Et c’est tant mieux même si on remarquera quelques réminiscences de la grande époque queenienne. Le disque n’a pourtant pas l’ambition d’exploser les charts, et on ne s’en plaindra pas. On retiendra l’aspect authentique et parfois engagé des morceaux, « Nazis 1994 » en tête. Il s’agit d’une diatribe ultra-directe contre les néo-nazis ; le texte est simple et sans détour, ne permettant aucun compromis ni aucune alternative. La musique convient parfaitement, n’étant pas explosive mais plutôt contenue et épurée malgré une rythmique très appuyée. Ce titre est une réussite tout comme « Revelations », énergique et travaillé, à la structure basique, basée sur des couplets calmes et une montée en puissance limpide et entraînante lors des refrains. La mayonnaise prend également sur « Touch The Sky » et son intro sereine tandis que « Foreign Sand » est une ballade émouvante où la voix éraillée de Roger Taylor s’exprime à merveille. Les performances vocales du principal intéressé sont d’ailleurs excellentes de bout en bout. Il est à l’aise et nous offre un condensé de ses possibilités, déjà éprouvées avec Queen. Toujours dans un registre très serein, « You Had To Be There » est meilleur que « Freedom Train » alors que « The Key » nous sort de notre légère torpeur.
Roger Taylor nous surprend avec ce disque, car on le savait capable de livrer des chansons mélancoliques, mais on ne le soupçonnait pas de tenir dans ce registre le temps d’un album, qui s’essouffle quelque peu avec les plus dispensables « Loneliness » et « Dear Mr Murdoch ». On gardera plus en tête le très intelligent « Everybody Hurts Sometimes » ou encore le nostalgique « Old Friends ». On retiendra avec plus de conviction encore la perle de ce disque, à savoir « Happiness », qui se rapproche de « Drowse » que le connaisseurs de Queen ont forcément en mémoire… L’impression générale que nous laisse cet opus est dès lors assez logique : on n’est pas complètement retourné ni ébahi devant ces titres ; on est juste satisfait de voir que Roger Taylor va de l’avant, qu’il n’a pas abdiqué et que deux ans après la mort de Freddie Mercury, il n’a peut-être pas tourné la page mais que son envie et sa motivation sont intactes.