Mary Austin, Madame Freddie Mercury
Des débuts de Queen à la mort du chanteur, Mary Austin fut son âme sœur. Et la seule femme avec laquelle il entretint une relation complète avant de faire son coming out.
Freddie Mercury n'était pas gay. Enfin si, mais pas uniquement. Pour beaucoup, ce sera l'information choc du biopic Bohemian Rhapsody. Au point que la communauté LGBT s'est émue sur la foi d'une bande-annonce insistant sur la relation privilégiée du chanteur de Queen avec une femme. Si le film - produit par deux membres du groupe - prend d'embarrassantes libertés avec la vérité, la relation de la diva défunte avec Mary Austin n'en fait pas partie. Et ce n'est pas un hasard si Freddie lui dédia la chanson Love of My Life en 1975.
Cette femme discrète et d'une loyauté sans faille fut tour à tour la maîtresse, la confidente, l'âme sœur et le pilier affectif de la rock star. Au point qu'il en fit sa principale ayant droit et légataire dans son testament. "Il lui vouait une reconnaissance sans bornes d'être restée à ses côtés contre vents et marées, sans jamais le juger", confie son biographe, Selim Rauer. Par sa complexité, l'histoire d'amour entre Freddie et Mary ne ressemble à aucune autre.
Une existence plan-plan
Elle germe en 1970 sur Kensington High Street, à Londres. Né à Zanzibar de parents indiens d'origine perse, celui qui s'appelle encore Farrokh Bulsara tombe sous le charme d'une timide vendeuse de la très branchée boutique Biba. Il a 24 ans, elle 19. Tout juste propulsé chanteur du balbutiant groupe Queen, il suit les conseils de Mary pour se façonner un look extravagant, dans l'air du temps. David Bowie, Marc Bolan et Roxy Music sont en train de mettre Big Ben à l'heure de l'androgynie glam rock.
Le couple emménage dans un studio où il mène une existence plan-plan, rythmée par le 5 o'clock tea, qui amuse ses visiteurs, dont le photographe Mick Rock. "Freddie ne quittait pas ses pantoufles et sa robe de chambre. Il était très maniaque sur la déco, les fleurs." La jeune femme l'accompagne lors des soirées. "Plus qu'un pied de nez aux ragots, Mary était aussi un moyen de rassurer sa famille et de se protéger des tabloïds", complète Selim Rauer. Qu'on se rappelle que le Royaume venait à peine de dépénaliser l'homosexualité en 1967.
Sept ans de cohabitation
Il n'empêche que Mary est sans doute la seule femme qui attire charnellement Freddie. Et que sa dilection pour les garçons - révélée lors d'un séjour en Inde à 14 ans - prend progressivement le dessus. Troublée, Mary veut croire à une passade. Et s'effondre quand le chanteur torpille leurs projets nuptiaux en mettant un terme à leurs sept ans de cohabitation. Elle lui parle de faire un enfant pour supporter son absence. Il lui propose de s'occuper de ses chats quand il est en tournée.
Mercury installera son amie dans un appartement voisin de la maison victorienne que le triomphe de Queen lui permet d'acquérir et où il organise des bacchanales délirantes. Mais les mâles conquêtes d'une nuit qu'il accumule - notamment lors d'un exil fiscal de trois ans à Munich, dont la vie nocturne est très sauvage - ne diminueront jamais la place de choix de Mary dans son cœur. Pas plus que sa relation poussée avec Barbara Valentin, l'égérie de Fassbinder, au début des eighties.
"A sa façon, il lui a été fidèle. Les amants importants de Freddie ont souvent pris ombrage de savoir qu'elle était la seule à le connaître aussi intimement", analyse Selim Rauer. De fait, Jim Hutton, pourtant indéfectible compagnon de la rock star de 1985 jusqu'à son décès, en 1991, fut prié par Mary de libérer le plancher de la demeure dont elle avait hérité. Elle s'y installera avec ses trois garçons et son mari décorateur. Qui demandera le divorce faute de pouvoir changer quoi que ce soit au mausolée en lequel elle l'a illico transformé.